mercredi 20 mars 2013

Une folle envie de capital

C'est la coutume, la rédaction pirate des films pour faire mourir l'industrie du crétinisme parasitaire, le fameux cinématographe.
De toute façon, tes impôts ont déjà payé pour toute ces images qui bougent avec des sons synchronisés, tu as le droit de les pomper sur le net en tant que tel de plein gré. N'hésite pas.
Alors voyons ce que nous proposent aujourd'hui les fonctionnaires de la poésie créatrice des sentiments à fleur de peau :


Cette comédie tendre et enjouée relate les aventures d'un couple aux prises avec les affres de la reproduction, avec force dialogues truculents et autres situations cocasses. On y apprend que le plus important, c'est l'amour, et que la famille aussi, tout cela par le biais d'images en couleurs et de personnages de vérité. Une folle envie de casser des crânes, ceux des acteurs évidemment mais surtout ceux du "scénariste" et de la personne qui a eu l'idée de cette cochonnerie diabétique, empare les nerfs du spectateur innocent qui commet l'erreur grave de consommer ce produit de plastique translucide jusqu'au bout. Ledit spectateur se sent très con de n'avoir pas appuyé sur STOP ou d'avoir jeté des briques dans sa télé géante. Jamais, jamais il ne récupérera les 80 minutes englouties dans ce torrent de caca jauni. Interdit aux plus de 6 ans. Cerise sur le râteau, on regrette l'absence remarquée de Sophie Marceau dans cette version de La Boum À La Clinique D'Insémination.


Enfin, enfin un film à message pour s'indigner avec vigueur de la méchanceté des banquiers. Il était temps. D'abord, ces enculés de banquiers sont sans scrupule, et après, ils prennent tout le pognon aux pauvres pour le donner aux riches. Non, franchement, on n'est pas d'accord. Bande d'enculés. À cet effet, Gad Elmaleh nous hypnotise en parvenant à froncer les sourcils pendant tout le film sans relâche. Car contrairement à d'habitude, il n'incarne pas un type simple et honnête de la vie de tous les jours dans la rue, mais bien un enculé qui gagne des millions et d'autres millions en limousines avec internet dedans. Alors il fronce les sourcils pour qu'on ne confonde pas avec ses autres films de d'habitude. Mais attention, le personnage de sa femme simplette est contre et demande à quoi peut bien servir tout cet argent et elle lit des livres sur Mao, et finalement on s'aperçoit que ce qui compte pour de vrai, c'est pas le vil argent, mais les repas de famille avec des oncles bourrus et des pommes de terres à l'huile en toute simplicité de la vie de tous les jours, bien plus que niquer des mannequins à New York, ou faire des virements, ou des chèques, ou prendre l'avion, ou avoir des rideaux épais. Mais, attention, Gad le banquier est plus complexe que cela, il est en fait tourmenté par tout le mal qu'il commet et finalement ré-encule les enculés pour leur faire comprendre que quand même, attention. Là, il défronce ses sourcils et sourit et on le reconnait mieux, notre bon Gad, ah voilà. Un film anti-millions par des millionnaires subventionnés, du grand art à fort tour de poitrine qui mérite une statue dorée au prochain festival de ceci ou de cela.
Malgré sa trop grosse longueur, ce film n'est pas trop chiant car sa nullité permet de glousser de manière répétée. De plus, on peut se lever plusieurs fois pour aller chercher du gâteau à la cuisine sans perdre le fil. Mais on remarque regrettablement la non présence culminante de Sophie Marceau dans ce remake de La Boum À Wall Street.

Passons à de vrais films :


Fase 7 est décevant parce qu'il y a S.O.D. dans la musique de la bande annonce, alors on bande, mais dans le film il y a seulement le t-shirt. Sinon, c'est un sympathique petit film d'épidémie, un peu mou, un peu complètement inoriginal, mais la réplique "Nous sommes sept plus une femme de ménage" vaut tout le film à elle seule. Mais bon, hein, bon. The Signal était infiniment supérieur, notamment en terme de supériorité.


L'Antisémite était merdique, Métastases est bon, malgré l'absence d'uniforme SS. Merci Dieudonné. Bis !

samedi 2 mars 2013

Ligne de flottaison

Enfin ça y'est ! Au terme d'un petite quarantaine de cacas (entre 38 et 43, selon une étude), j'ai terminé la lecture de
Mais, mais, se déconcerte la personne que tu es, pourquoi dévaluer de si nombreux moments de volupté ? Pourquoi se sevrer le neurone avec aussi peu, voire tant de rien ? Pourquoi corrompre de cette manière du temps de mammifère heureux ? Pourquoi rabaisser l'aboutissement du merveilleux travail intestinal à ce vertige de l'infiniment petit ? Pourquoi, re-pourquoi ? C'est une question volumineuse, mais à dédramatiser : il s'agissait seulement des cacas du matin, au premier étage. Les cacas du soir, au rez-de-chaussée, sont toujours consacrés à des oeuvres dignes de toute la considération enthousiaste de l'être humain de bonne qualité, par exemple les magnifiques écritures du Professeur Choron ou les aventures de Superman chez Joseph Staline. Soyons audacieux mais pas téméraires, Nelly une fois sur deux seulement.
Donc, pourquoi ai-je commis cet acte qualifiable de lecture masochiste ? Pour la gloire de la connaissance bien sûr, mais surtout pour respecter le principe de l'indignation documentée. Indignez-vous, disait un monsieur mort dont les écrits inspirèrent de nombreux adolescents exaltés. Oui d'accord, mais alors en connaissance de cause, sinon ça ne vaut pas plus qu'un bouchon de stylo orphelin.
Or l'indignation surchauffa mes bulbes pileux quand l'aîné de mes bébés, élève de troisième année de CÉGEP, m'informa que son professeur de français inscrivait la lecture de Folle au programme de l'année. Passées les premières minutes de déni stupéfait, et après avoir été convaincu qu'il ne s'agissait pas d'une blague très lourde, je décidai donc de lire cette chose afin de vérifier la justesse de mon indignation en ébullition. Il semblait aberrant de faire lire ceci dans une école, mais il restait un espoir que ce texte fût finalement un livre, et non pas une version longue des incroyablement nulles chroniques de maman Nelly dans feu l'hebdo gratuit Ici. Ne pas condamner sans savoir, avant de secouer la tête avec dépit. Lire ce "livre". Dont acte, parce qu'il est exclu de se ridiculiser comme les sous-hommes qui avaient signé une pétition anti Irréversible sans l'avoir vu (ah tiens, dont Amir Khadir; étonnant, non ?).
Eh bien voilà. 41 cacas plus tard, j'ai consommé l'intégralité du machin, et je confirme que la classe du style, la profondeur philosophique, le trame narrative, la poésie des sentiments, l'originalité, la culture, bref tous les éléments clef des chroniques de Nelly sont abondamment disponibles dans ce "roman". C'est de la magie. Industrieuse, mais de la magie, car cela occupe plus de 160 pages, un tour de force.
Alors toi qui es encore vierge de cette expérience gravitationnelle, je peux t'épargner la vie d'une quarantaine de cacas en te livrant les points saillants de ce texte :
- le style est : journal intime de fille urbaine
- le contenu est le détail de la relation de quelques mois entre la fille urbaine et un monsieur non nommé, qui semble tout aussi brillant
- et puis c'est tout.
C'est comme la Boum, avec Nelly le rôle de Sophie Marceau, mais en plus ennuyeux et avec des protagonistes plus âgés d'un quinzaine d'année sur le plan physique, mais pas intellectuel.
Si tu es élève du fameux CÉGEP et que tu dois remplir une fiche de lecture, voici ce qu'il faut retenir :
- le nom du chat est Oréo
- cela se passe sur la Plateau
- le nom du bar est Billy Kun
- les gens consomment de la coke
- il y a des DJ avec des blousons
- le monsieur est très beau
- il pratique la pornographie ambidextre
- de même que la fille urbaine, mais moins
- la fille urbaine et le monsieur font aussi des cochonneries ensemble, soit chez eux, soit au chalet
- la fille est malheureuse et se jette sur son oreiller en sanglotant
- elle avorte
- éléments récurrents du scénario : branlette, prénoms de femmes, enculer et espionnage d'email
- un paragraphe sur deux se termine sur une référence à la sagesse du grand-papa mort ou à la tante cartomancienne (mais j'ai oublié les signes astrologiques de tout le monde, désolé)
- le papa du monsieur aimait l'astronomie et les étoiles fabriquent des atomes de fer
- voir la page psychologie de Elle Québec
Je ne mens pas.
La professeure de français incriminée plus haut inscrivit cette oeuvre fulminante au programme sous le thème de l'"individualisme", dans la lignée de René Descartes (je n'invente pas). Descartes - Nelly Arcan, tout un axe littéraire. Je vais relire les Méditations Métaphysiques, j'ai dû rater la scène où il s'essuie la bite dans l'herbe.
On en est donc rendus à ce niveau dans l'enseignement : après la visite du salon de l'auto (unique sortie scolaire de mon même bébé au secondaire), assimiler ce nombrilisme morveux force 15 à de la littérature et le faire lire à des étudiants. Car oui, parmi les trois livres que ces jeunes gens vont lire cette décennie (et les cinq suivantes), il était important de faire figurer celui de Nelly. Il n'y avait pas vraiment d'autre choix, la littérature est un domaine tellement peu fourni.
Alors à quand une analyse comparée en bac de philosophie de Sex In The City et Cloud Atlas selon l'herméneutique agnoslipe du maharadjah pulvérulent de Daniel Craig ? La conception du big mac à l'école hôtelière en douze semestres, peut-être ? Et le prochain prix nobel de littérature à Twitter de Facebook ?
Mais non, halte au sarcasme, ne fabriquons pas de pessimisme d'arrière-garde en supputant que le niveau baisse. Non, soyons modernes et progressistes, ouverts et télépathes, démocrates et bio-positifs : voyons le bon côté des choses. Ici, grâce à Nelly, c'est la cause étudiante qui sort moralement victorieuse; on sait désormais que sa lutte pour le pouvoir d'achat, sa revendication de la gratuité scolaire est tout à fait légitime si l'on considère que le prix à payer doit être en phase avec la valeur d'usage de l'objet consommé.